
Comment les enseignants vérifient ChatGPT : astuces et méthodes pratiques pour l’évaluation
Avec l’essor des outils d’intelligence artificielle comme ChatGPT, les enseignants se retrouvent face à de nouveaux défis pour évaluer l’authenticité des travaux des étudiants. Certains élèves utilisent ces outils pour générer des textes, rendant la tâche d’identification plus complexe.
Pour déceler les écrits assistés par IA, les enseignants recourent à des méthodes variées. Ils examinent la cohérence stylistique, recherchent des incohérences contextuelles et utilisent des logiciels de détection de plagiat. La formulation des questions de manière plus ouverte et subjective permet aussi de limiter l’usage d’outils automatisés, encourageant ainsi une réflexion personnelle plus approfondie.
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Plan de l'article
Les enjeux de l’utilisation de ChatGPT en éducation
L’utilisation de ChatGPT dans le domaine de l’éducation soulève des questions majeures. Au Collège Montmorency, des formations ont été organisées en février 2023 pour démystifier cet outil d’intelligence artificielle, avec le soutien de Philippe Lavigueur. Les étudiants, souvent enclins à utiliser ChatGPT pour tricher, comme l’a rapporté Jean-François Caulier de Sorbonne Université, posent un défi significatif aux enseignants.
Avantages et inconvénients
Serge Miranda de l’Université Côte d’Azur qualifie ChatGPT de « tuteur numérique individualisé et virtuel », soulignant son potentiel éducatif. Toutefois, Bernard Quinio de l’Université Paris Nanterre met en garde : ChatGPT freine l’acquisition de certaines connaissances essentielles. La directrice de France Université Numérique (FUN), Catherine Mongenet, a récemment abordé ces enjeux lors de la conférence « IA et pédagogie » les 8 et 9 juin à Pantin.
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Initiatives et perspectives
Pour répondre à ces défis, plusieurs initiatives voient le jour. Camille Salinesi, professeur et vice-président aux affaires internationales à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, collabore avec Serge Miranda sur le Projet Prompt U, visant à intégrer de manière réfléchie l’IA dans l’enseignement. De son côté, Jean Rohmer de Fredrik R Bull propose une éducation vivante pour contrer les effets négatifs de l’IA, insistant sur l’importance de la coopération et de la créativité, comme le rappelle Dominique Boullier de Sciences Po.
Réactions des acteurs de l’éducation
Les réactions des acteurs de l’éducation varient. Alain Goudey de Neoma BS recommande aux enseignants d’explorer ChatGPT et de modifier leurs examens si l’IA réussit. Alexis Hay du Lab UA rappelle l’importance de la taxonomie de Bloom dans l’évaluation, soulignant que l’évaluation des compétences doit aller au-delà des simples réponses générées. Arthur Mensch de Mistral AI, ancien employé de Deepmind, souligne l’importance de continuer à former d’excellents élèves en mathématiques, un domaine où ChatGPT peut aussi être un outil précieux.
Techniques pour détecter l’utilisation de ChatGPT dans les travaux étudiants
Jean-François Caulier, maître de conférences à Sorbonne Université, a observé que les étudiants utilisent ChatGPT comme outil de triche. Pour contrer cette tendance, plusieurs méthodes ont émergé.
Méthodes de détection
- Utilisation d’outils de détection : Des logiciels spécialisés comme Turnitin ou Copyleaks ont intégré des fonctionnalités pour repérer les textes générés par des modèles de langage comme ChatGPT.
- Analyse stylistique : Les enseignants examinent les variations de style et de cohérence dans les travaux soumis. Un changement soudain de ton ou de vocabulaire peut indiquer l’utilisation de ChatGPT.
Thomas Desserrey, ingénieur pédagogique au Lab UA, a bloqué la fonction de copier-coller de ses QCM sur Moodle vers ChatGPT. Cette initiative vise à réduire la tentation pour les étudiants de générer des réponses automatiques.
Approches pédagogiques
Dominique Boullier de Sciences Po souligne que l’enjeu est de former les étudiants à la coopération et à la créativité. Cela passe par des évaluations qui mettent l’accent sur les processus de réflexion plutôt que sur les réponses finales.
Alain Goudey de Neoma BS recommande aux enseignants d’explorer eux-mêmes ChatGPT et de réviser leurs examens en conséquence. Adapter les questions pour qu’elles nécessitent une réflexion critique ou des connaissances contextuelles peut rendre l’utilisation de ChatGPT moins efficace.
Surveillance et prévention
Pour prévenir la triche, certains établissements optent pour une surveillance renforcée lors des examens. Cela inclut l’utilisation de logiciels de proctoring et l’analyse en temps réel des comportements suspects.
Ces techniques, bien qu’efficaces, nécessitent une vigilance constante et une adaptation continue aux avancées technologiques.
Méthodes pratiques pour évaluer les compétences au-delà des réponses générées
Serge Miranda de l’université Côte d’Azur qualifie ChatGPT de « tuteur numérique individualisé et virtuel ». Dans ce contexte, comment évaluer la pensée critique des étudiants ? Voici quelques pistes éprouvées.
Évaluations basées sur des projets
Bernard Quinio, enseignant-chercheur à l’université Paris Nanterre, déclare que ChatGPT freine l’acquisition de certaines connaissances. Pour contrer cela, l’évaluation par projets pousse les étudiants à démontrer leurs compétences à travers des réalisations concrètes, plutôt que des réponses générées automatiquement. Camille Salinesi de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne collabore avec Serge Miranda sur le Projet Prompt U, une initiative favorisant des évaluations pratiques et contextuelles.
Questions nécessitant réflexion critique
Alain Goudey, directeur général adjoint en charge du numérique à Neoma BS, recommande d’adapter les examens pour inclure des questions nécessitant une réflexion critique. Cela inclut des scénarios complexes où les étudiants doivent justifier leurs choix et proposer des solutions alternatives.
Utilisation de la taxonomie de Bloom
Alexis Hay du Lab UA rappelle l’importance de la taxonomie de Bloom dans l’évaluation. En se concentrant sur les niveaux supérieurs de la taxonomie—analyse, évaluation, création—les enseignants peuvent pousser les étudiants à aller au-delà des simples réponses générées.
Conseils pour former les étudiants à une utilisation éthique de ChatGPT
Claire Doz, enseignante de lettres au lycée Paul Valéry, organise les « lundis de l’IA » pour sensibiliser ses élèves aux enjeux éthiques de l’intelligence artificielle. Ces sessions permettent d’aborder les problématiques liées à l’utilisation de ChatGPT et d’autres outils numériques. En formant les étudiants à reconnaître les limites et les biais de ces technologies, elle vise à développer leur esprit critique et leur capacité à utiliser ces outils de manière responsable.
Jean Rohmer, président de Fredrik R Bull, propose une éducation vivante pour contrer les effets négatifs de l’IA. Il met l’accent sur des méthodes pédagogiques qui favorisent la coopération et la créativité. Pour Rohmer, l’usage éthique de ChatGPT passe par une compréhension profonde de ses mécanismes et de ses impacts sur l’apprentissage.
Arthur Mensch, fondateur de Mistral AI et ancien employé de Deepmind, souligne la nécessité de continuer à former d’excellents élèves en mathématiques. Pour lui, une utilisation éthique de ChatGPT inclut une solide formation scientifique. Mensch insiste sur le fait que les compétences en mathématiques permettent de mieux comprendre les algorithmes et les modèles de langage derrière des outils comme ChatGPT.
Dominique Boullier, professeur des universités en sociologie à Sciences Po, précise que l’enjeu est de former à la coopération et à la créativité. Selon Boullier, la formation à l’utilisation éthique de ChatGPT doit inclure des modules sur la collaboration entre humains et machines. Cette approche permet de préparer les étudiants à un avenir où l’intelligence artificielle et les compétences humaines coexistent de manière harmonieuse.